Pologne – Autour de Cracovie, les camps d’Auschwitz et de Birkenau

Retour sur une petite semaine en Pologne en mars dernier, l’occasion de découvrir Cracovie et Varsovie. Pour lire le début des aventures, c’est ici.

Comme je l’avais annoncé dans mon premier article sur notre expédition en Pologne en mars dernier, je souhaitais faire un article spécial sur ces deux lieux proches de Cracovie et qui, outre l’intérêt de cette très jolie et agréable petite ville, sont une raison de plus d’y faire un détour : les Mines de sel de Wieliczka et les camps d’Auschwitz et Birkenau.

J’avais envie d’aborder les deux en même temps car pour moi, il était important de ne pas limiter Cracovie à ces camps de concentration tristement célèbres. Effectivement, ils sont à côté et le nom de Cracovie est connu pour ça dans les bouquins d’histoire, mais je trouve cela un peu dommage de connaître cet endroit de la Pologne juste pour cela (je dis ça car c’était mon cas avant de prendre l’avion pour venir ici!), alors qu’il a bien d’autres richesses ! Et puis, ce n’est pas un sujet forcément évident à aborder alors ça me semblait important aussi de ne pas faire un article tout sombre et tout triste, ben oui. Et puis au final, en écrivant cet article, je me suis rendu compte que ça ne le faisait pas. Je me voyais mal enchaîner sur les deux sujets, comme ça. Il faut du temps pour digérer la visites des camps, récit que j’ai écris en premier.

◊ Pourquoi visiter ces camps ?

Bref, on pourrait tout de même se demander s’il est bien nécessaire d’aller y faire un tour. C’est vrai, nous avons tous eut ces images atroces en tête en apprenant l’histoire de la seconde guerre mondiale et de l’extermination des juifs, pour certains, nous avons vu des photos, des films… alors a-t-on vraiment besoin d’aller voir sur place ? Est-ce que ce n’est pas un peu malsain sur les bords tout ça ? (C’est aussi la question que je me pose au sujet des photographes de guerre par exemple… faut-il tout montrer?). Je redoutais beaucoup cette visite, ayant toujours été très perturbée lorsqu’il s’agissait d’en parler à l’école.

Pologne - Cracovie Marie

Au final, je n’ai pas tellement de réponse, mais je sais que c’est une bonne chose d’y être allée. J’ai eu l’impression de, au moins une bonne fois dans ma vie, faire mon devoir de mémoire sur ce pan de l’histoire. Pendant toute une après-midi, j’ai pu penser à tous les malheureux qui sont passés par ces endroits sinistres, apprendre ce qui leur est arrivé et leur accorder au moins ce temps-là de ma vie, si peu en comparaison avec ce qu’ils ont subit, en une sorte d’hommage. Et la visite était très bien orientée en ce sens : il n’était pas question d’avoir tous les détails horribles et malsains de leur souffrance dans ces camps, mais plutôt d’apprendre, de chercher à comprendre et surtout d’ancrer ces images dans sa tête afin d’être sûr de ne jamais plus recommencer.

Nous n’avons pris aucune photo lors de notre visite à part l’entrée des camps d’Auschwitz avant que nous n’y entrions. J’avais pris mon appareil au cas où… et puis très franchement, arrivée devant ce portail si célèbre, toute envie de photo m’est complètement passée. Bien que des gens le fassent (et se prennent carrément en selfie en posant avec un grand sourire……………) cela nous a semblé complètement déplacé (et inutile… franchement, qui regarderait ces photos-là dans sa maison?). Car encore une fois, nous n’y sommes pas venus en tant que « touristes », pour « visiter » mais en tant qu’humains et qu’européens, liés à cette Histoire.

Nous l’avons visité un après-midi de mars, sous la neige, les doigts gelés, l’estomac dans les talons.

Pologne - Cracovie Marie

◊ Comment se passe la visite

Pour parler des détails pratiques : la visite se fait en petit groupe mené par un guide (il y en a qui parlent français) et on visite les deux camps, Auschwitz puis Birkenau à la suite en à peu près 3h30. A la fin de la visite guidée, il est possible de continuer seul et de faire le tour des pavillons, notamment de ceux dédiés aux victimes de chaque pays concernés. Il faut compter une vingtaine d’euros (comprenant la navette qui part de Cracovie et qui va jusqu’aux camps).

La visite est très dense, notre guide n’aura pas arrêté de parler pendant toute sa durée, nous noyant un peu parfois sous le nombre d’événements, de chiffres, de noms, de détails, tous pourtant si marquants. On entre dans les baraquements d’Auschwitz où l’on voit des photos, des cartes, mais aussi certains restes des camps qui nous laissent deviner l’ampleur de la cruauté de leurs tenanciers (des piles de chaussures récupérés aux prisonniers, des montagnes de cheveux rasés qui servaient à faire des perruques, les fameux pyjamas rayés, etc). On visite également les cellules, les dortoirs, les sanitaires communs et les fours et salles de gazage. On découvre toute « l’inventivité » sordide des nazis pour créer de nouveaux moyens de persécuter les juifs, de les faire souffrir, de les utiliser pour faire « évoluer la science ». Autant dire que c’est très dur émotionnellement parlant…

Ensuite, on se rend à Birkenau, ce camp immense construit à la suite d’Auschwitz lorsque ce premier camp était arrivé à saturation et qu’il fallait aller encore plus vite dans le génocide. Le chemin de fer entre directement à l’intérieur afin de décharger encore plus vite les juifs devant être exterminés. Il ne reste plus grand-chose à vrai dire, puisqu’il y a été presque entièrement détruit par les nazis eux-mêmes, lorsque sentant la fin de la guerre approcher, ils ont tenté de faire disparaître « les preuves ». Mais on peut surtout voir les fondations des baraquements et s’imaginer la taille de ce monstre lorsqu’il tenait encore debout…

La visite met mal à l’aise, elle laisse sans voix, elle nous fait se demander « pourquoi ? » et surtout, je n’ai pas pu m’empêcher d’éprouver du ressentiment envers ceux qui osent prétendre que tout ceci n’est pas arrivé. Nous avions envie que quelqu’un apparaisse et nous dise que tout ceci est faux et est fait en pâte à sel, mais la vérité est juste tellement crue, là sous nos yeux, que nous ne pouvions rien faire d’autre que tenter de l’admettre.

Nous n’aurons que très peu parlé entre nous, assommés par tout ce que nous entendions et voyons, le cœur se nouant souvent, presque effrayés de ce que nous allions découvrir dans la prochaine pièce, effrayés de nos propres émotions aussi, de ne pas réussir à contenir ce mélange de colère, d’horreur et d’impuissance.

◊ N’oublions jamais

En retournant à Cracovie, nous nous sommes interrogés sur l’espèce humaine, sur ce que nous sommes capables de faire de plus horrible et de plus lâche, se rappelant ces expériences telles que celle de Milgram ou encore celle de Stanford qui ont montrées que l’être humain est capable de chose que l’on préférerait savoir impossible. Nous avons discuté de ce gardien d’Auschwitz, travaillant à leur extermination le jour mais vivant une parfaite vie de famille en bon père aimant le soir lorsqu’il rentrais chez lui, ne se rendant pas compte de l’horreur de son travail. Nous nous sommes demandés « et nous, qu’aurions-nous fait ? ». Nous éprouvions une drôle de sensation, comme si tout ce que nous faisions ou disions sonnait faux et vain, bien futile par rapport à ce que nous avions vu. Et puis, en arrivant à Cracovie, où la vie suit son cours, nous nous sommes sentis « chanceux », nous nous sommes dit qu’aujourd’hui est bien différent et nous nous sommes réjouis de la facilité que nous avons à agir comme bon nous semble (prendre les transports en commun, manger une pizza quand nous le souhaitons et tout ça sans même se poser la question d’une quelconque difficulté). Et nous nous sommes dit que nous n’oublierions jamais et qu’il nous fallait rester attentif aux événements et à toute manifestation de cruauté autour de nous, ce qui a malheureusement fait écho au présent.

N’hésitez pas à me faire part de vos sentiments à ce sujet : avez-vous déjà visité ces camps ? Si oui, qu’avez-vous ressenti ? Si non, aimeriez-vous vous y rendre ?

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Et si vous ne savez pas quoi faire après cet article, je vous propose de voyager encore un peu ici, et ici, ou .

Bonne route !

23 réponses sur “Pologne – Autour de Cracovie, les camps d’Auschwitz et de Birkenau”

  1. En effet ce n’est pas un voyage que je projete de faire, mais c’est bien d’avoir ton retour/expérience..
    Pour ma part, j’aime bien en savoir plus sur la guerre mais je ne pense pas être assez curiose pour aller voir un camp de concentration 😐
    Mais n’empêche c’est un très bon article, bravo 😉

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  2. Super post😃C’est etrange car je suis justement en Pologne et je m’interroge sur la nécessité de visiteur les camps de concentration… C’est mon premier jour à krakow !

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  3. Comme toi je m’interroge vraiment sur les gens qui nient le fait que ces camps ont existe. Et ceux qui ne se rendent pas compte que ca pourrait arriver a nouveau facilement etant donner le tour que prend ce 21eme siecle…

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    1. Il y a des gens à qui ont aura beau fournir tous les arguments nécessaires, ils ne voudront toujours pas croire à la vérité… comme tu le dis, c’est très alarmants et d’actualité ! A nous de nous battre pour proclamer la vérité !

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  4. J’ai également visité les camps l’été dernier lors d’un séjour. Ce qui m’a mis mal à l’aise c’est le contraste entre les camps et nous les touristes qui avancions en troupeau avec les guides, vite vite pour tout voir comme dans n’importe quel musée.

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    1. Et j’imagine qu’en été, il devait y avoir encore plus de monde ! C’est vrai, c’est assez dérangeant d’en avoir fait « une attraction touristique ». Il faudrait peut-être diminuer le nombre de personne possible à l’intérieur, ou faire en sorte que ce soit plutôt considéré comme un lieu de recueillement avant tout !

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  5. J’ai déjà visité deux camps de concentration et je pense que, même si c’est difficile, c’est très intéressant à voir, pour se remémorer, et qu’on ait conscience que ça a existé, et que ça ne doit plus jamais recommencer! J’ai beaucoup aimé ton article!

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    1. Merci beaucoup ! Je suis tout à fait d’accord avec toi ! J’imagine d’autant plus transmettre ce savoir à mes enfants, mes petits-enfants pour qui tout cela semblera tellement vieux et qui risquerait de ne plus le prendre en compte par exemple.

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  6. Un très bel article… j’ai l’estomac noué rien qu’à sa lecture. J’avais visité le musée de l’holocauste à Washington et déjà j’avais ressenti tout ça… on suit l’histoire de l’holocauste et on a chacun une petite carte d’un(e) vrai(e) déportée(e), on suit son histoire et à la fin, on apprend si elle/il a survécu et ce qu’elle/il est devenu(e) après la guerre. On a l’impression de rentrer dans l’Histoire, c’est très bien fait.
    J’aimerais beaucoup visiter les camps de concentration pour les mêmes raisons que toi, mais c’est vrai que j’ai peur de tout ce que ça peut remuer. Je n’arrive pas à croire que des gens se prennent en selfie dans un endroit pareil !!

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    1. Je ne connais pas ce musée mais je trouve ça très intéressant de « lier » les visiteurs à une personne victime de l’holocauste, cela nous rapproche encore plus de ses évènements qui peuvent parfois paraître assez abstraits !
      Il y a des gens qui devraient surement remettre leur utilisation des selfies en question 😉

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  8. Merci beaucoup pour ton bel article ! Je souhaiterais un jour pouvoir visiter un de ces camps, mais je ne pense pas en avoir émotionnellement la force.

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    1. C’est vrai que c’est vraiment dur et j’ai longuement hésité avant d’y aller ! Cela ne sers à rien de se forcer à les voir, il faut pouvoir en retirer un enseignement et pas juste de l’épouvante…

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  9. Finalement, ils étaient comme des salariés d’un abattoir, niant l’humanité des personnes qu’il avaient devant eux. Comme on fait avec les bêtes.
    A te lire j’ai eu les larmes aux yeux. Mon copain y a déjà été, moi jamais et je pense que je m’effondrerais, je ne sais pas si je supporterais car rien qu’en lisant ton article, j’ai les larmes aux yeux 😦 J’étais aussi sortie bouleversée du musée de Yed Vashem à Jérusalem alors les camps …

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    1. Ton analogie est très intéressante et très juste et je pense que c’est tout à fait cela : dans la tête des gens qui travaillaient dans ces camps, il ne s’agissait pas de personne à tuer, mais d’animaux, rien de plus. Et tout était fait pour leur faire voir les choses ainsi ! C’est à se poser des questions sur notre propre perception des choses…
      Je pense que cela ne sers à rien de se forcer à visiter ces camps, il s’agit d’une expérience émotionnellement très dure, qui marque l’esprit, qui remet en question énormément de choses. On ne peut pas se préparer à ce que l’on va y trouver et cela ne sers à rien, je pense, de s’infliger ce moment, si cela n’apporte rien d’autre que de la détresse. Il y a bien d’autres moyens pour se documenter, rendre hommage aussi, l’important est de réussir à le faire à sa façon, avec son propre langage et sa propre sensibilité…

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      1. Effectivement, c’est comme ça, je pense, que les « nazis » ont fait leur oeuvre, persuadé qu’ils abattaient des nuisibles, comme on chasse parfois un cafard ou des souris.Comme l’homme peut être cruel … et pourtant aussi capable de tellement belles choses. C’est aussi bien de s’en rappeler surtout après avoir visité de tels endroits ! Merci pour ta réponse Marie 🙂

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      2. Il faut croire en les belles choses que l’Homme est capable de faire, mais ne pas oublier les pires 🙂 Merci à toi pour toutes tes remarques intéressantes !! C’est chouette de pouvoir développer un sujet avec d’autres personnes 🙂

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  10. Je suis germaniste de formation et pour la rédaction de mon mémoire de maîtrise, j’ai été amenée à visiter plusieurs camps dont Buchenwald, en ancienne RDA.
    Mes potes et moi avions parcouru 4km dans les bois et arrivés sur place, un silence de mort. On n’entendait plus les oiseaux. C’était très perturbant.

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